l'eau qui te sauve

la nuit règne l’absurde
le jour l’incolore
les mots résonnent vides
comme des falaises guettant la mer 
où de grands rochers muets 
camouflent leur récit
le soleil se dérobe
te laissant seul 
face au néant

même les chiens errants
marchent l’œil triste et bas
le silence ne sert à rien 
quand tu es sombre et las
tu n’as rien à pleurer
ni à regretter
rien à oublier
l’ombre pieuvre s’étend
tassant les reliefs du passé
ta vie s’étale plaine rase
fatal désert de la banalité

et puis 
de très loin
lentement
fantômes errants devenant réalité
se dévoilent en procession
la pensée d’un sourire 
l’odeur douce d’une peau caressée
une flèche de lumière dans les nuages percés
des taches s’élargissant en bleu et blanc
pour colorier un nouvel univers

alors 
les cônes de pluie s’éloignent
la tristesse se dissout dans les limbes

et surtout 
ton cœur bat
quand tes pieds nus se crispent sur le sable
tout revient 
dans une bouffée submergée de sens
exquise tiédeur
mécanisme huilé de la pression 
talon plante orteils 
pointillisme de la texture
plaisir inégalé de cette marche unique 
éphémère
la longue trace de tes pas
bientôt couverte par la mer

as-tu remarqué
c’est toujours l’eau qui te sauve
le souvenir de son odeur salée
le cycle du roulement de la marée
l’écume qui point avec le vent
il suffit que tu songes 
à une plage nue d’hiver
sur le relief breton
pour que tu plonges 
et t’immerges sans raison
dans le non-dit de l’enfance
à nouveau tu avances
à nouveau tu espères
Conseil: une fois sur les poèmes, passez d'un texte à l'autre avec les flèches du clavier