lili la lune là

Lili regarde 
la lune danse 
pour toi et moi 
la lune est là 
couchée en niche 
la lune vit 
dedans sa mue 
la lune a bu 
fâchée en nage 
la lune à l’houx 
mouille son dos 
la lune à l'eau 
se fout du loup 
la lune lit 
puis se rendort 
la lune luit 
et rit là-haut 
lune qui ment 
jamais faucille 
tu es marteau 
qui frappe les 
douze longs coups 
à la minuit 
fais donc comme elle 
et vit la nuit 
quand il fait noir 
dessous la lune 
les chats sont gris 
et les regrets 
aussi Lili

voile transparent

J’ai vécu ce moment incroyable
La dernière fois où sa poitrine s’est soulevée
Je n’aurai jamais imaginé cela
Et malgré tous nos débats nos conflits
Malgré surtout l’attente vaine et le non dit
Un voile gris s’est abattu sur ma vie
Les gens les objets les paysages ont perdu du relief
Vivre est devenu un film en sépia
Où les couleurs ont fondu
Comme dans un tableau de Turner
Comment supporter le poids de l’invisible
Marcher dans un monde sans liesse
Où le rire se fend
Où le soleil se rend
Vous rêvez au ralenti dans des rues inconnues
Sans savoir où aller
Parfois vous reconnaissez quelqu’un
Sans pouvoir lui parler
Que dire
La douleur givre et vous pétrifie
Longtemps la situation sera figée
Dans cette vie atrophiée
Puis la renaissance viendra par les sons
Chaque jour ils seront plus nets et les contours aussi
Vous marcherez plus vite dans des rues connues
Aux visages amis vous direz bonjour
Gaiement sans retenue
Le voile sera chaque jour plus transparent
Et enfin un beau matin le soleil est là
L’invisible n’est pas remplacé
Il s’est installé dans votre cœur
Et vous vivez avec lui en lui souriant
Avec lui se sont éteints
Les regrets les reproches les jugements
Il ne reste que l’amour
Il ne reste en vous
Que du beau du chaud
Du doux du lisse et du fluide
Le temps est une merveilleuse machine
A magnifier le passé
Et c’est tant mieux

dialogue sur la beauté

Pourquoi demanda l’homme en regardant le ciel
Un jour qu’il avait peur des éclairs de feu
Sans réponse il créa Dieu
Et Dieu se vengea d’avoir été dérangé
Il donna à l’homme la haine et l’intolérance
Et c’est ainsi que les jours de fureur reviennent
Où les hommes s’entretuent au nom de Dieu
Dans le sang du sang
Pour les siècles des siècles
Mais Dieu donna aussi à l’homme le goût de la beauté
Si futile dans un monde de survie
Si utile pour des débats infinis

Mais pourquoi Dieu a-t-il fait cela

Le monde doit être bon ou mauvais
Car il lui faut des règles pour s’organiser
Mais il n’a pas besoin d’être beau ni laid

A quoi peut servir la beauté

Les anciens y voyaient une marque de divinité
Tout éphèbe était fils d’Apollon dieu des Grecs et des Romains
Mais pourtant
Beauté en deçà des Pyrénées laideur au-delà
Beauté éphémère beauté éternelle
Pour Hegel elle n’existe même pas à l’état naturel
Elle est création de l’homme
Vision fugace dans un œil désoeuvré
La beauté ne règle rien ne résout rien

Mais que serais-je sans elle

Pour moi elle fume elle bouillonne elle explose
C’est un volcan une irruption
La beauté c’est mon amphétamine
Mon graal ma quête ma luxure
Je lui cours après depuis ma naissance et même avant j’en suis sûr
Quand je n’étais encore ni homme ni femme
Dans le ventre fécond de ma mère

L’ai-je jamais rejoint
Ai-je jamais fusionné avec elle

Mais non
La beauté n’est qu'un désir
Elle est toujours là à portée de cœur
Elle court plus vite que moi en minaudant chafouine
Mais c’est ça que je veux
Telle sera mon épitaphe sur ma tombe ni belle ni laide

Il passa sa vie à vouloir la beauté
Est-elle auprès de lui maintenant

Nul autre que moi ne répondra
Et seuls ceux que j'aimais pourront m'interroger

allié

la neige n’est pas l'eden
elle est un autre paysage
elle n’habille pas elle transforme
le laid l’inutile l’inconnaissable

objets éléments souvenirs
tout se fond dans sa beauté
l’arbre devient totem la forêt montagne
la blême prairie un lac infini
qui vous invite à la mélancolie

ne cherchez pas de contours connus
vous avez changé de lieu de siècle
le temps est à l'envers la modernité enfouie
il ne reste que l’homme
face à la nouvelle nature
froide et chaude une et multiple
où tout est relié sans rupture

seule chaîne avec l’horizon de l'au-delà
esquisse d’éternité dans un grain de flocon
que le blanc a dessiné d’une seule envolée

la neige est un allié
pensez à sa force qui vit en secret
et quand vous serez seul ici-bas
cherchez-y l’harmonie du temps qui va
prenez la dans vos mains et soufflez
Conseil: une fois sur les poèmes, passez d'un texte à l'autre avec les flèches du clavier