yeux d'ange

elle a des yeux d’ange et la peau d’un bébé
le sourire d’une star un port de reine
la voix rauque enjôleuse et la mine enjouée
et quand elle se penche sur vous
d’un coup d’épaule affectueux
elle vous enveloppe de tous ses parfums
déesse elle vous enivre
elle griffe la vie de ses doigts de pianiste
elle vieillit sans être jamais vieille
on est habitué à ses rides de marbre et de bois
comme s’ils avaient toujours été là
à sa longue main fripée toujours aussi douce
on dirait une lionne assoupie
qui profite d’un répit
pour rassembler ses petits
rien ne sert de lui mentir
elle ne voit que les sourires du cœur
elle devine les ombres entend le silence
elle est sarah cléopâtre pythie
mère de toutes les mères
fragile et forte
elle est le geste et la vie
elle est la tendresse
éternelle

forêt

il y avait la forêt
les arbres les bosquets
Puis au petit matin
Cette brume pâle et sage
Comme un nouveau paysage

Il y avait des lignes précises
Des couleurs de toutes les gammes
Et maintenant ce gris camaïeu
Ces teintes si proches et si distantes

Il y avait les chants et les bruissements
Les feuilles qui se balançaient
L’herbe vibrant de mille vents
Et maintenant tout est figé
Dans ce froid surnaturel imposant

La vie est ainsi
Et le cœur aussi

Mais je sais que viendront les trouées de lumière
Et les frémissements sans manière
Peu à peu tout changera
Le nuage s’évanouira
Cachant ses rides et dévoilant son âme
Il n'y aura plus de joie éteinte ni de drames
Tout sera dit à nouveau
Murmuré au fil de l'eau

Si les cris ont fusé
Ils seront inutiles et glacés
Si les larmes ont coulé
Elles seront bousculées

Le sourire donnera la paix la douceur
Et l’on ne saura plus le temps que l’on préfère
La nostalgie tapie à l’aube de son cœur
Ou le soleil rouge régnant sur l’univers

ivoire et lumière

elle est l’ivoire et la lumière
et l’ombre aussi quand ses yeux noirs
me pourchassent comme des phares
statue de souffle et de matière
qui jette ses cheveux au ciel

d'interminables jambes la relient à la terre
elle est libellule frôlant l’eau
cigogne secouant les épaules
pour se dégager du lourd fardeau
que dépose le regard des autres
sur son étrange et langoureuse beauté

ses sourires sont des éclairs aveuglants
et sa voix oh sa voix inoubliable
m’enveloppe d'un nuage éphémère

partout où elle les pose
ses longs doigts créent des formes
rondes et douces chaudes
qui construisent l’espace autour d’elle
princesse guerrière
je voudrais lui prendre la main
chaque fois qu’elle la bouge
pour figer le paysage qu’elle dessine

elle est la source de vie et la force aussi
qui forge le destin des autres
que je le veuille ou non
qu’elle me dise oui ou non
je suis pris dans sa toile de fée
envoûté

l'herbe est un nuage

L’herbe est un nuage un bain de mousse et de bulles
Les arbres noeuds des sorcières préhistoriques
La terre une maison de rats trouée de taupes
Et quand la lune menteuse luit dans le gris
C’est que le jour et la nuit se sont mis d'accord

Je ne verrai jamais les choses comme elles sont
D’ailleurs les choses ne sont pas ce qu’elles sont
Elles seront ce que j’en dis ce que j'en distingue
Le champ est un prélude à la forêt la mare

Une invitation aux faucheux aux mangoustes
L’amour un sourire qui dure malgré tout
Les choses les gens deviennent ce qui les cerne

La filandre vole dans l’air jusqu’à la branche
Comme un cœur qui cherche son nid chaud tout là-haut
La nature n’est pas un temple elle est caverne
Peuplée de lumières floues et de bruissements
Qui la construisent la déchirent dans le vent

L’homme transpercé par les rayons et les larmes
Devient la cible unique de toutes ces vies
Et du vaste chaudron bouillonnant de son âme
Voici la vapeur des mots qui s’envole et fuit

Seul résistant à la noria des attaquants
J'esquive je fuis je crie ma haine mon bruit
Je serai le phénix de la fureur du verbe

Conseil: une fois sur les poèmes, passez d'un texte à l'autre avec les flèches du clavier